Le crowdshipping - Rentable et durable
Crowdshipping, crowdsourced delivery, crowd logistics : autant de synonymes d’une tendance logistique en plein boom dans l’économie de partage. Court-circuitant les sociétés de messagerie, des acheteurs en ligne se font livrer leurs commandes par des particuliers, en indiquant leur moyen de transport de prédilection. (Dimitri Dewever)
Bpost a déjà expérimenté Bringr en 2016, Colruyt a lancé Apporto en 2018, un réseau en ligne où les clients peuvent se livrer mutuellement leurs courses. Et depuis 2021, Shopopop, la plus grande plateforme de crowd- shipping d’Europe, opère elle aussi dans notre pays. Son concept est aussi simple qu’ingénieux. Une application mobile permet aux internautes de se faire livrer des achats à domicile par un particulier de leur quartier pour une petite somme d’argent. À cette fin, les détaillants ajoutent Shopopop comme option de livraison à leur plateforme d’e-commerce ou à leur site web.
« Nous voulons ainsi centraliser au maximum les commandes et réduire les déplacements : gain de temps, d’argent, de trafic automobile et d’émissions », explique Sacha Buyck, Country Manager Benelux chez Shopopop. « Lorsque les gens effectuent d’office un certain trajet, il leur est possible de s’arrêter une minute pour prendre et livrer une commande. Moins de kilomètres, c’est aussi moins d’émissions, moins d’embouteillages et une meilleure qualité de l’air. »
Tout le monde en selle !
Les ‘coursiers particuliers’ empruntent souvent un itinéraire fixe pour se rendre au travail et en revenir, à des moments pratiques pour tout le monde, mais il peut également s’agir de personnes qui passent par hasard dans le quartier. Une fois la commande passée, l’application recherche un coursier dans le voisinage qui peut effectuer la livraison en cours de route. Le but est d’éviter, autant que possible, que des personnes aient à faire des détours pour aller chercher et livrer une commande.
En contrepartie, les livreurs reçoivent une petite rémunération (minimum 5 euros) qui varie en fonction de la distance, de la dimension et de la « difficulté » de la livraison, comme livrer un colis au deuxième étage par exemple. « Notre objectif est d’acheminer les commandes à bon port en 120 à 180 minutes maximum », précise Sacha Buyck. « Plus il y a de personnes qui rejoignent notre réseau, plus ce délai est réalisable. Grâce à cette flexibilité, les gens peuvent aussi choisir de se faire livrer leur commande lorsqu’ils sont chez eux : cela évite de devoir revenir une deuxième ou une troisième fois, comme c’est souvent le cas avec d’autres services de livraison. »
Détaillants et modes de transport
Aujourd’hui, le réseau Shopopop au Benelux compte plus de 5.000 coursiers particuliers actifs, c’est-à-dire des personnes qui ne sont pas simplement inscrites, mais qui effectuent aussi des livraisons. Soit une moyenne de 60.000 livraisons par an. Plusieurs centaines de détaillants proposent le service de livraison : de grandes enseignes comme Colruyt, Carrefour et Cora, mais également des commerces locaux indépendants, notamment des magasins d’alimentation. « Les détaillants paient à Shopopop un petit montant par course, qui varie notamment en fonction du nombre d’envois », explique Sacha Buyck. « Le prix est fixé par pays et par région. Mais c’est toujours moins cher que ce que les détaillants paieraient s’ils offraient le service en interne. »
Le service vise tous les produits qui peuvent être placés dans une voiture ou une camionnette. Donc, ni trop grands ni trop lourds. « Notre réseau ne convient pas pour les lessiveuses ou les réfrigérateurs », précise Sacha Buyck. Les personnes qui passent commande peuvent aussi indiquer leur moyen de transport préféré. Ici, vous avez le choix entre une voiture ou une camionnette, mais aussi un vélo ou même un piéton. « Actuellement, plus de 90 % des livraisons via notre plateforme sont effectuées en voiture. Mais, la part du vélo devrait augmenter à l’avenir, notamment parce que les villes interdisent de plus en plus l’accès de leurs centres aux voitures. Et puis, les vélos cargos et autres véhicules de ce genre pouvant servir à la livraison d’articles plus grands gagnent aussi en popularité », ajoute-t-il.
Impact social et sociétal
Le crowdshipping a également un impact social, puisque Shopopop a pour principe fondateur de ne travailler qu’avec des livreurs particuliers. « Nous visons à exploiter au maximum les trajets des particuliers. Cela nous différencie clairement des coursiers éclair ou des sociétés de livraison professionnelles comme Deliveroo et Uber- Eats », explique Sacha Buyck. « De plus, ces entreprises doivent avoir une certaine envergure pour être rentables, ce qui les contraint à n’opérer que dans les grandes villes de notre pays. »
Ce n’est pas le cas du modèle de Shopopop, applicable partout, même dans les petites localités. « Partout où il y a des gens, les livraisons sont possibles ». Pour les personnes éloignées du marché du travail, la livraison de commandes peut favoriser leur (ré)insertion. Les pensionnés en retirent des contacts sociaux. Quant aux étudiants, le crowdshipping est une source de revenus appréciable. « C’est vraiment du gagnant-gagnant pour tout le monde », souligne Sacha Buyck. « Pour la société, les commerçants, les consommateurs et les coursiers. »
Shopopop tente actuellement de calculer la réduction de l’empreinte carbone induite par les livraisons passant par sa plateforme. Ces chiffres seront publiés en 2024. Le potentiel est en tout cas énorme. « Si les 12 millions de Belges rejoignaient notre réseau, notre pays compterait autant de livreurs potentiels et il y aurait moins de voitures exclusivement destinées aux livraisons sur les routes », conclut Sacha Buyck .
Cet article est paru dans le Top 5.000, qui est disponible en PDF.