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En Marge du Top 5.000 - Des augmentations difficiles à digérer

T05_2023_FR_200La flambée des prix de l’énergie ont progressivement ralenti l’activité industrielle et obligé le consommateur à puiser dans son bas de laine.  (Tony Coenjaerts)

Le Covid plus ou moins endigué, le monde espérait pouvoir reprendre une vie normale lorsque le canon s’est mis à tonner dans les plaines d’Ukraine étouffant progressivement la croissance, pourtant vigoureuse (5,3 %), enregistrée au premier trimestre de 2022 avec en bout de course, une progression de 3,2 % sur base annuelle dont l’essentiel, soit deux points de pourcentage, doit être attribué au consommateur qui, pour ce faire, a copieusement puisé dans son bas de laine. Le prix des produits énergétiques s’est emballé, propulsant le taux d’inflation de l’année à 10,3 %, un sommet jamais atteint depuis le début en 1996, des mesures européennes harmonisées (IPCH).

Indexation

Même si en termes nominaux, le revenu disponible brut des particuliers a enregistré avec 7,9 % la plus forte progression jamais observée au cours des deux dernières décennies, leur pouvoir d’achat s’est en réalité, détérioré. Contrairement à une idée reçue, l’indexation ne protège pas entièrement le pouvoir d’achat, ne serait-ce que parce que, depuis 1994 déjà, l’indexation s’effectue au départ d’un indice-santé, c’est-à-dire l’indice des prix à la consommation dont a été retirée une trilogie jugée nuisible : les carburants, l’alcool et le tabac. L’indexation démarre en outre avec retard en raison de ce que l’on appelle le lissage c’est-à-dire la prise en compte de la moyenne des indices santé des quatre derniers mois.

Dans la fonction publique, les choses sont simples : chaque fois que l’indice-santé lissé franchit un indice pivot – ce qui en 2022 est arrivé à cinq reprises – les salaires et traitements sont augmentés de 2 % deux mois plus tard. Dans le secteur privé, la situation est plus complexe. Si, pour une moitié des travailleurs, le mécanisme est semblable à celui de la fonction publique avec une indexation dès qu’un pivot est franchi, l’autre moitié doit toutefois s’armer de patience. Pour elle, l’indexation ne peut intervenir qu’à des moments précis dont la fréquence, variable, s’étage entre un mois et un an de sorte que près d’un million de travailleurs ont dû patienter jusqu’en janvier 2023 pour voir enfin, leurs salaires adaptés à l’évolution du coût de la vie. Ce qui précède n’a pas empêché nos coûts salariaux d’augmenter plus vite que chez nos voisins, ravivant ainsi un handicap salarial que l’on croyait éliminé.

Frites conquérantes

C’est, par exemple, le cas de notre industrie alimentaire dont le chiffre d’affaires 2022 a bondi de 23,3 %. Toutefois, cette hausse exceptionnelle est uniquement imputable aux augmentations de prix répercutées. En termes de volume, les chiffres auraient plutôt tendance à se racrapoter, Fevia estimant à 3 % le recul enregistré au cours des deux dernières années. L’année 2020 semble avoir, avec ses restrictions et fermetures prophylactiques, marqué un tournant en ce domaine. Depuis, le secteur se trouve doublement coincé : par le consommateur tout d’abord, de plus en plus friand d’emplettes à l’étranger ; par la grande distribution ensuite, avec laquelle il faut durement négocier et dont les magasins sont de plus en plus approvisionnés au départ de l’étranger.

Et pourtant, ce secteur demeure aussi actif qu’innovant. Premier producteur de frites surgelées en Europe, Clarebout, qui possède deux unités de production dans notre pays, en construit actuellement une troisième dans le port de Dunkerque, appelée à tourner 24 heures sur 24 et a, au passage, absorbé son concurrent Mydibel. Le chiffre d’affaires de l’ensemble ainsi constitué dépassera le milliard d’euros. Les hectares disponibles commençant à se faire rares dans notre pays, un autre grand de la frite, Agristo (CA consolidé 902 millions, en progression de 44 %), s’est porté acquéreur dans le Nord de la France du site d’Escaudœuvres délaissé par le sucrier Tereos.

Dans le sillage de ces géants s’activent les recycleurs, grands et moins grands. En juin 2022 est entrée en fonction à Gand, une nouvelle unité de fabrication de biodiesel au départ d’huiles usagées – un investissement de 150 millions de dollars. Modeste collecteur de graisses à ses débuts, Quatra, basé à Lokeren, revendique une douzaine d’années plus tard 130.000 clients et se pose en leader européen de la spécialité.

Parfois même, les pouvoirs publics doivent tempérer l’un ou l’autre appétit. Pour son 75 ième anniversaire Ter Beke (CA consolidé 782 millions d’euros) s’est offert un nouveau nom (What’s Cooking) ainsi qu’un nouveau logo et aurait aimé ramener au pays la première entreprise à avoir utilisé en Europe, une salle conditionnée pour la fabrication de salami. Constituée dans les années cinquante, Imperial Vleeswaren, aujourd’hui Imperial Meat Products, est en effet, depuis 2014, propriété du conglomérat mexicain Alfa. Mais les autorités de la concurrence, tant belge que néerlandaise, ont vu les choses autrement…

Volumes réduits

Une autre victime collatérale du conflit ukrainien est la chimie, secteur dans lequel un chiffre d’affaires record camoufle en réalité une baisse de la production. En décembre dernier, Pfizer annonçait, par exemple, investir 1,2 milliard d’euros (répartis sur trois ans) dans son site de Puurs où l’emploi est, depuis l’apparition du Covid, passé de 2.700 à plus de 4.000 unités. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps. « En Europe, l’énergie sous forme de gaz est trois fois plus chère qu’aux Etats-Unis et l’électricité y est moitié plus chère », se plaignait récemment Jim Ratcliffe, patron d’Ineos dont le projet de craqueur d’éthane n’en finit pas de faire trembler le gouvernement flamand. Ce projet verra-t-il le jour ? L’ambiance n’est plus vraiment à l’investissement et les annonces de chômage économique se télescopent. « Jamais, nous n’avons enregistré pareil recul, qui nous ramène au niveau de l’an 2000 », observe le Voka de la région d’Anvers et du pays de Waes qui depuis une quarantaine d’années recense les tonnages produits sur 31 grands sites industriels. Par rapport à l’année record de 2018, le recul est de près de 20 % - et de mauvais augure pour les résultats de 2023.

Services

Déjà pour notre industrie, dont les secteurs alimentaire et chimique constituent des acteurs essentiels, les clignotants tendent à se multiplier. C’est d’autant plus inquiétant que, depuis longtemps déjà, nous avons cessé d’être une nation industrielle. En chiffres ronds, notre pays occupe quelque 4,1 millions de salariés. Plus de 80 % d’entre eux sont employés dans les services, commerciaux (42 %) ou non commerciaux (39 %).

Dans ce secteur aussi, des croissances remarquables sont enregistrées. Tel Van Moer Logistics qui a multiplié les acquisitions en 2022 et affiche au terme de cet exercice un chiffre d’affaires consolidé de 300 millions d’euros. Pionnier du transport intermodal, Van Moer est également en train de convertir, au rythme de vingt véhicules par mois sa flotte de camions en poids lourds bicarburants hydrogène-diesel. Côté approvisionnement, l’Américain Plug Power construira sur l’ancien site d’Opel une usine qui devrait produire à l’horizon 2025 quelque 200.000 tonnes d’hydrogène vert, c’est-à-dire obtenu par hydrolyse de l’eau à partir d’électricité renouvelable.

Après avoir passé dix ans sous l’égide du Français Naxicap, The House of HR, plus connu sous sa marque Accent, est passé sous contrôle américain : 55 % des parts du premier fournisseur européen de services de ressources humaines est désormais détenu par Bain Capital. Le solde est partagé entre le management, Naxicap et la fondatrice du groupe, Conny Vandendriessche qui a ouvert en 1995, à Roulers, une modeste agence d’intérim. Aujourd’hui le chiffre d’affaires du groupe, qui a grandi par acquisitions successives – 16 pour la seule année 2022 –, avoisine les trois milliards d’euros, fournit chaque mois un emploi à quelque 70.000 personnes et joue à fond la carte du numérique avec, notamment, CTRL-F dédié aux spécialistes en informatique, ingénierie et finances ou encore, Gighouse, une plate-forme qui cherche à apparier entreprises et indépendants en quête de missions en tant que free-lance.

Côté titres-services, Het Poetsbureau, qui opère désormais en tant que Glowi et tire 90 % de son chiffre d’affaires consolidé (195 millions d’euros) de services de nettoyage assurés chez des particuliers vient de changer d’échelle avec l’adjonction des 4.200 personnes occupées par Easy Life (Huishoudhulp). Le nouvel ensemble ainsi constitué est, avec 15.000 personnes occupées, leader incontesté du secteur.

Résultats

Ensemble, les entreprises industrielles et commerciales de notre Top ont enregistré un chiffre d’affaires de 968 milliards d’euros. L’augmentation, 17,8 %, est certes impressionnante mais résulte essentiellement d’augmentations de prix de sorte qu’en 2022, la valeur ajoutée ne représente plus que 20 % du chiffre d’affaires, ce qui traduit un recul de 2 % par rapport à l’année dernière.

Les bénéfice nets (42 milliards) progressent certes de 3,8 milliards mais l’augmentation enregistrée par une seule entreprise (KBC Groupe) explique, à elle seule, la quasi-totalité de cette différence. Les frais de personnel ont, d’un exercice à l’autre, augmenté en moyenne de 6,3 % par heure et de 7 % par personne. Toutefois, divers secteurs ne pratiquant qu’une indexation annuelle, un tiers environ des travailleurs du privé a enregistré en janvier de cette année une augmentation salariale de 11 %, la plus importante depuis des décennies.

Le secteur bancaire a vu son bénéfice net progresser de 5,8 à 9,1 milliards d’euros et celui des assurances, de 2,8 à 3,8 milliards d’euros mais dans l’un comme dans l’autre secteur, la loi des grands nombres a joué.

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Cet article est paru dans le Top 5.000, qui est disponible en PDF.

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