Top Transport - La dernière ligne verte ?
Quelle option choisissez-vous lorsque vous commandez en ligne ? De nombreux fournisseurs proposent en effet plusieurs scénarios : une livraison rapide le lendemain, comme si c’était devenu la chose la plus normale au monde, ou l’option la plus écologique avec laquelle vous devrez sans doute attendre votre colis un peu plus longtemps. À travers ce choix, les boutiques en ligne veulent nous sensibiliser et se positionner comme des acteurs pour qui la durabilité est une priorité absolue et qui regroupent leurs envois. Car transporter plus d’air que de marchandises étouffe la moindre ambition de rendre la route plus verte entre le fabricant et le client.
Les problèmes rencontrés dans la chaîne d’approvisionnement nous ont forcé à regarder la réalité en face : nous sommes devenus des consommateurs pourris gâtés et la rapidité de la livraison est devenue l’argument privilégié des fournisseurs pour se démarquer dans une concurrence toujours plus rude. De part et d’autre du trajet, il est difficile d’abandonner ces acquis, avec parfois des dérives véreuses qui font l’actualité.
L’avenir est trop cher
L’une des questions est de savoir dans quelle mesure nous sommes prêts à renoncer à notre luxe. Une autre est celle des prix abordables. À côté du manque criant de chauffeurs et de la hausse du prix des carburants, le verdissement de la flotte est sans conteste l’un des sujets les plus abordés dans les comités de direction des sociétés de transport. C’est une bonne chose que des entreprises, sans doute motivées par la course aux scores autour d’Objectifs de développement durable, soient manifestement déjà mieux disposées à payer plus pour des trajets verts, contrairement au consommateur.
Pareil pour l’électrification du parc automobile. Si des sociétés s’y attèlent dans le cadre de leur stratégie durable et peuvent compter sur des incitants fiscaux, le portemonnaie de Monsieur Tout-le-Monde n’est pas encore prêt. En marge de la crise de l’énergie et de l’inflation, il voit surtout l’écart abyssal entre le prix d’achat d’un véhicule électrique et celui d’une voiture ‘classique’ avec un moteur à combustion. « L’avenir est trop cher », traduisait un analyste lors du dernier Salon de l’Auto. Et même si les citoyens achetaient massivement de tels bolides écologiques, rien ne dit que notre infrastructure électrique serait prête à les accueillir ou que ce rêve vert ne serait pas d’emblée grillé par un court-circuit fatal.
L’avenir est inestimable
Nous sommes tous plongés dans l’inévitable bain de la transition énergétique, les yeux rivés sur les dernières minutes de l’horloge de l’Apocalypse. Si nous tardons, la planète se chargera elle-même de retirer la prise. « Une fois encore, nous avons détruit ce que nous n’avons pas le pouvoir de créer », disait John Coffey dans ‘La ligne verte’, un film basé sur le roman éponyme de Stephen King. Coffey, interprété par Michael Clarke Duncan aux côtés de Tom Hanks, est condamné à mort. Pendant ses derniers jours dans le couloir de la mort, baptisé ‘ligne verte’ d’après la couleur du sol, il s’avère que Coffey possède des pouvoirs surnaturels. Son don nous serait bien utile aujourd’hui. Ne serait-ce que pour nous permettre de voir l’avenir avec ses yeux et nous encourager à inverser vigoureusement le mouvement. Nous n’avons pas le choix et nous donnerons peut-être ainsi une bouffée d’espoir à ceux qui se demandent si notre société n’a pas déjà franchi irrémédiablement son ultime ligne verte.
(Tommy Browaeys)
Cet article est paru dans le Top Transport qui est disponible en PDF.