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Combinaison e-trucks et trains

Le marché des e-trucks démarre peu à peu, en Belgique également. Quelques grandes entreprises, dont AB InBev, Colruyt Group et Coca-Cola, comptent déjà plusieurs camions électriques dans leur flotte et beaucoup plus encore en commande. « Un e-truck est idéal pour les distances courtes et les trajets en ville, mais il ne convient pas encore pour le transport longue distance », dit Mark Pecqueur de Thomas More. (Dimitri Dewever)

Chercheurs, constructeurs et entrepreneurs sont quasiment unanimes : les e-trucks auront une place dans le transport routier de demain. Certes, notre pays accuse un retard dans l’adoption du camion électrique. À peine 28 e-trucks sont immatriculés en Belgique aujourd’hui. Aux Pays-Bas, le compteur affiche 270 et l’infrastructure de recharge est déjà plus développée. La Belgique possède pourtant un atout de taille : sa situation centrale. « Le Benelux est le cœur battant de l’Europe et LE lieu par excellence pour contribuer à l’essor concret d’un transport routier écologique dans toute l’UE », affirme Robert Ziegler, directeur général pour l’Europe chez Einride, une société globale d’origine suédoise, experte du transport et spécialisée dans des solutions complètes avec véhicules électriques et autonomes.

Coûts d’utilisation et distribution urbaine

En décembre dernier, Einride a annoncé une collaboration avec AB InBev en Belgique, pour le déploiement d’une flotte étendue de camions électriques pour le transport lourd entre Bruxelles et Louvain. Le brasseur prévoit ainsi de réduire ses émissions de CO2 de 500 tonnes par an. « Actuellement, les camions électriques coûtent encore quatre fois plus à l’achat que leurs versions diesel, mais ils sont moins onéreux à l’usage », dit Ziegler. « Ils nécessitent moins d’entretien, ils n’usent aucun filtre à huile, leurs freins ont une durée de vie plus longue parce que le freinage utilise l’action du moteur électrique, etc. » PwC a calculé que le Total Cost of Ownership (TCO), c’est-à-dire le coût d’utilisation incluant le carburant, l’assurance, l’entretien, etc., d’un camion électrique sera identique à sa version diesel en 2025. Cinq ans plus tard, en 2030, un e-truck coûterait même 30 pour cent de moins au kilomètre qu’un camion diesel.

Un e-truck est idéal pour la distribution urbaine et des livraisons sur des trajets fixes et courts, par exemple d’une usine vers un centre logistique ou un entrepôt, estime également Mark Pecqueur, professeur et directeur de recherche en technologie automobile à la Haute École Thomas More. Il ajoute toutefois quelques remarques. Dans un scénario parfait, ces livraisons se dérouleraient de nuit sur des distances courtes et le véhicule pourrait se recharger entièrement pendant la journée sur le site de l’entreprise, via des panneaux solaires ou des éoliennes. Mais si cet e-truck roule de jour, il sera plus compliqué de le recharger avec de l’électricité verte produite en interne après le coucher du soleil. « Cela ne me paraît pas une bonne idée de stocker cette électricité pendant la journée dans une batterie stationnaire pour l’injecter ensuite dans un camion pendant la nuit. »

La question de l’énergie

Pecqueur attire aussi l’attention sur les grandes quantités d’énergie nécessaires pour charger complètement la batterie d’un e-truck. La capacité de batterie des plus gros modèles peut aller jusqu’à 1 Mwh. « La recharge complète d’une telle batterie en une heure avec un chargeur rapide consommerait la quantité d’électricité dont 500 ménages ont besoin : ce n’est donc pas simple. » Et ce n’est pas le fait de générer une telle quantité de courant qui pose problème, estime le directeur de recherche. Étant donné que le chargement intervient souvent lors de pics (un grand nombre de véhicules en même temps ou à des heures où le réseau électrique est déjà surchargé), la crainte est surtout que la capacité du réseau électrique ne soit pas suffisante.

C’est la raison pour laquelle des acteurs tels qu’Einride développent des plateformes énergétiques qui gèrent intelligemment la demande et l’offre d’électricité sur les sites industriels. Ce n’est pas parce qu’il est possible de charger des e-trucks à pleine vitesse qu’il faut forcément toujours le faire. Cette puissance peut être réglée et équilibrée. Robert Ziegler : « Nous fournissons une solution complète : e-trucks, infrastructure de recharge et logiciel intelligent qui permet notamment le load balancing et qui formule des recommandations : sur la façon d’optimaliser la durée de vie de la batterie et même les trajets du véhicule en termes de consommation électrique. Nous déchargeons ainsi nos clients de nombreux tracas, imprécisions et variables. Ils investissent dans le transport électrique pour une période d’au moins cinq ans, nous nous chargeons du reste. »

Transport électrique à longue distance

Reste l’autonomie. Sur ce point également, les e-trucks conviennent parfaitement aujourd’hui sur des distances courtes et moyennes de 100 à 300 kilomètres avec une seule charge de la batterie. Quel regard portent donc les experts sur les camions électriques pour le transport international et longue distance ? Mark Pecqueur y voit peu d’avenir pour les e-trucks. « En 2021, j’ai collaboré à l’étude d’ING Fuels of the Future. L’enquête conjointe menée auprès de nos transporteurs belges a montré que la volonté de miser sur l’e-truck pour les longues distances était faible. »

Selon Robert Ziegler, cela ne pose pas forcément problème. « Le transport routier électrique pour les longues distances existe déjà : c’est le train. Je pense que la combinaison du transport par e-trucks et voie ferrée est promise à un bel avenir. Les camions électriques conservent alors un rôle essentiel pour les livraisons porte-à-porte et le dernier kilomètre dans les centres urbains. Nous avons d’ailleurs contribué à la réalisation d’une liaison intermodale entre l’Allemagne et la Suède pour un client : les marchandises sont transportées par e-truck vers le train, ce train les achemine ensuite dans un autre pays où elles sont déchargées et à nouveau transportées par camion électrique jusqu’à leur destination finale. »

Incitants fiscaux et atouts écologiques

Les autorités belges ont adopté diverses mesures pour stimuler la croissance des e-trucks, comme des subsides pour l’achat et l’installation d’une infrastructure de recharge et des avantages fiscaux pour les entreprises qui investissent dans des e-trucks. « Il existe évidemment aussi de nombreux avantages écologiques, qu’il est possible de pousser plus loin encore », pense Mark Pecqueur. « Aujourd’hui, des camions au diesel sont autorisés à circuler dans les zones à faibles émissions. Pourquoi les villes n’organiseraient-elles pas un système qui réserverait l’accès à ces LEZ aux seuls camions électriques ? Cette technologie existe déjà. Les camions roulant à l’énergie fossile pourraient alors déposer leur chargement à la périphérie de la ville dans un centre de distribution, d’où elles seraient acheminées jusque dans le centre-ville par des véhicules 100 % électriques. »

Les e-trucks ont pour avantage de n’émettre localement ni oxyde d’azote (NOx) ni monoxyde de carbone (CO), mais leur moteur très silencieux les rend aussi parfaitement adaptés aux livraisons en zone urbaine. Robert Ziegler : « Les camions électriques effectuent des livraisons à toute heure sans causer de nuisances sonores. Ainsi, nos e-trucks peuvent circuler et livrer de nuit sans problème dans de grandes villes comme Stockholm, car les riverains ne les entendent pas. »

L’hydrogène en complément

Enfin, Mark Pecqueur pense que les camions à l’hydrogène constituent une belle alternative pour le transport longue distance par camion. « Sur le plan strictement énergétique, l’hydrogène n’est assurément pas la meilleure solution, mais il convient parfaitement au modus operandi d’une société de transport. Aujourd’hui, les transporteurs envoient des camions diesel vers l’étranger avec une autonomie de trois à quatre mille kilomètres. Ils font le plein en Belgique de façon à pouvoir calculer précisément le coût du carburant et à ne pas devoir faire le plein à l’étranger ni recharger à mi-chemin et perdre ainsi du temps sur le trajet de retour. C’est capital parce que les marges bénéficiaires sont très faibles dans le secteur. »


Cet article est paru dans le Top Transport qui est disponible en PDF.

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